ENSEMBLE Nr. / N° 23 - November / Novembre 2017

21 ENSEMBLE 2017/23 —– Fokus Réseau Joint Future Joint Future est un réseau de personnes qui, au sein des paroisses des Eglises réformées Berne-Jura-Soleure, s’engagent en faveur de projets liés à la migration et à l’intégration. «Joint Future» signifie «avenir commun». La 9 e rencontre annuelle du réseau a rassemblé une soixantaine de personnes à la maison de pa- roisse de Zollikofen. Au programme, l’interven- tion de Madame Sinnadurai, un théâtre-forum et de nombreux ateliers: «offres d’emploi à bas seuil», «activités créatrices», «tandems», «rôles hommes-femmes», «asile ecclésiastique» et «rencontres interculturelles pour elles». vice d’un temple. On devrait toujours être attentif au potentiel caché de l’être humain. Certes, mais pour s’intégrer sur le marché de l’em- ploi, c’est tout de même le potentiel visible qui est important, non? Tout à fait, et je le conçois. Je pose juste une question: dans le système tel qu’il est conçu ac- tuellement, comment favoriser l’accès au monde du travail? Les gens arrivent en Suisse avec un diplôme étranger qui n’est pas reconnu; ils doivent donc reprendre une formation. Mais qui paye? Sans compter les lourdeurs administratives… Quels sont les blocages pour les personnes issues de la migration qui tentent de s’intégrer profes- sionnellement? La langue est assurément un facteur impor- tant. Beaucoup de réfugiés tamouls sont arrivés ici et se sont concentrés sur un vocabulaire mini- mum utile pour le travail, du style: «Oui, chef, je fais la plonge!» Si quelques mots suffisent, pour- quoi aller plus loin? En plus, ces personnes ont pensé qu’elles allaient rapidement pouvoir repar- tir, jusqu’à ce que les enfants arrivent et prennent la première place. Et en matière juridique, quelles sont les bêtes noires de l’intégration sur le marché du travail? Les différents statuts de séjour, à coup sûr, qui empêchent en partie d’obtenir un permis de tra- vail. Combien y en a-t-il qui aimeraient travailler, mais qui ne peuvent pas? Ils traînent à longueur de journée et malheureusement, c’est comme ça que naissent les mauvaises idées. Quelles sont les mesures qui faciliteraient l’accès au marché du travail? Réduire drastiquement les exigences légales liées au permis. Et aussi, permettre à cette popu- lation de se rendre utile en lui trouvant des occu- pations. Que diriez-vous à un employeur qui hésite à en- gager une personne issue de la migration? Que la peur prédomine tant qu’on ne connaît pas l’autre et que les préjugés ont la vie longue. Qu’il faut se donner du temps pour découvrir son interlocuteur. Enfin, dernier point: qu’il vaut la peine de tenir compte des compétences propres à la deuxième génération, comme le bilinguisme. La deuxième génération déploie-t-elle vraiment des potentialités spécifiques? Evidemment! Grâce à l’école et à la connais- sance de la langue, nous avons un meilleur bagage que nos parents, ce qui nous permet de monter dans l’ascenseur social. Nous ne sommes plus des êtres de seconde classe, nous pouvons regarder les Suisses droit dans les yeux. En matière de potentiel, qu’est-ce qui distingue un Suisse d’une personne issue de la migration? Question difficile. La population suisse est hé- térogène et la population issue de la migration, aussi. Je connais des Suisses qui sont nés dans des familles paysannes et qui doivent se lever tous les jours à quatre heures du matin pour traire les vaches. Ce n’est peut-être pas l’image qui vient instantanément à l’esprit quand on pense au Suisse typique. On imagine plutôt un bureaucrate nanti. Je suis devenue prudente avec les petites cases! Et vous, quels sont vos potentiels cachés? (rires) Ce n’est pas très suisse de parler de soi, si? Mes potentiels? Ils sont restés en veille pendant longtemps, mais moins maintenant. Par exemple, mon intuition: elle me permet d’entrer en contact avec presque tout le monde, des enfants, des per- sonnes âgées… La différence d’âge n’a pas d’im- portance, j’arrive à me mettre à la place de la personne, à la comprendre, à percevoir ses besoins. Je vois à travers l’autre. Je rêve qu’une fois, sur ma carte de visite, il y ait écrit à côté de mes fonctions: «humaine». ©Adrian Hauser Théâtre-forum sur le thème de l’intégration. Forumtheater zum Thema Integration.

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