ENSEMBLE Nr. / N° 43 - November / Novembre 2019

9 ENSEMBLE 2019/43 —– Dossier pas pris position sur ce sujet, il n’existe donc pas d’‹opinion officielle› de l’Eglise réformée de Zu­ rich. L’engagement ecclésial en faveur de l’initia­ tive pour des multinationales responsables est certes facile à comprendre, car il touche aux droits humains et à la justice. Mais la mise en œuvre concrète de l’initiative est pour l’Eglise une ques­ tion sensible, qu’elle ferait mieux de laisser à la politique.» «Dynamique d’autoconservation» Quels sont les risques inhérents à l’engagement politique de l’Eglise, et comment gère-t-elle le «pouvoir»? «L’action politique, comme dans le cas de l’initiative pour des multinationales respon­ sables, présente à la fois des opportunités et des risques par rapport à l’acceptation de l’Eglise», relève Christoph Grupp, qui partage ainsi, au moins partiellement, les réserves de Michel Müller. «Grâce à sa taille, il est facile pour l’Eglise de créer de la visibilité et d’exercer une influence positive sur la politique à l’échelle mondiale», ob­ serve Felix Gmür. «D’un autre côté, poursuit-il, il y a aussi une certaine dynamique d’autoconser­ vation et un risque d’abus du pouvoir.» Michel Müller complète: «Les opinions ne doivent jamais être imposées par la force, c’est dangereux et ça ne s’est pas révélé efficace au fil du temps – mais par ailleurs, réduire l’Eglise au silence sur le plan politique s’est révélé tout aussi inefficace.» En rai­ son de la séparation claire entre Eglise et Etat, le risque de voir les Eglises abuser de leur pouvoir est aujourd’hui minime. Un avis partagé par Ursula Marti: «Auparavant, l’Eglise avait beaucoup trop de pouvoir, il fallait se soumettre à ses conceptions de la morale. Au­ jourd’hui ce n’est heureusement plus la même chose. Elle reste néanmoins puissante, du fait de sa taille, mais aussi parce qu’elle demeure pour beaucoup de gens une instance écoutée. C’est à l’Eglise de se montrer responsable.» Evaluer soigneusement Et qu’en sera-t-il à l’avenir? «Je souhaite que l’Eglise évalue soigneusement son engagement politique», déclare Christoph Grupp. «Mais à par­ tir du moment où les responsables ecclésiaux jugent nécessaire de prendre position ou d’inter­ venir au niveau politique, ils devraient le faire en pleine conviction.» «L’Eglise doit vivre avec son temps et être prête à se transformer et à parler ouvertement de sujets d’actualité», estime Ursula Marti. «Par exemple, j’attends de l’Eglise qu’elle prenne clairement position contre le racisme et l’exclusion.» Michel Müller serait favorable à ce que les Eglises déploient plus d’engagement théo­ logiquement fondé dans le domaine environne­ mental, et mettent en revanche un peu moins d’accent sur l’éthique sexuelle. Pour Felix Gmür: «Les Eglises devraient se tenir informées et avoir le courage de participer dès le début au débat, y compris sur des sujets novateurs comme la numé­ risation.» «J’apprécie le discours politique associant un éventail aussi large que possible de personnes.» Béatrice Wertli ©Keystone /Peter Klaunzer «Je souhaite que l’Eglise évalue soigneusement son engagement politique.» Christoph Grupp ©Adrian Hauser

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