ENSEMBLE Nr. / N° 44 - Dezember / Décembre 2019

10 Dossier —– ENSEMBLE 2019/44 Sociologue et écothéologien, Michel Maxime Egger a créé le Laboratoire de transition intérieure à Pain pour le prochain. Conscient du bouleversement écologique qui touche la planète, il appelle à un changement de paradigme grâce à l’écospiritualité. Par Nathalie Ogi Qu’est-ce que l’écopsychologie? Etymologiquement, on pourrait dire que c’est l’étude des interrelations profondes entre «l’oikos», la Terre, la nature comprise en tant qu’habitat, et la «psyché», l’âme humaine. On n’est pas ici dans une relation dualiste entre l’être humain et l’en­ vironnement, mais dans une unité entre la Terre et tous les êtres qui l’habitent. En écopsychologie, l’être humain fait non seulement partie de la na­ ture, mais celle-ci habite également en lui. Les écopsychologues disent que l’être humain porte en lui, dans son corps et jusque dans son in­ conscient, toute la mémoire de l’évolution cos­ mique, toute l’histoire de la Terre et du vivant. Ce mouvement a pris racine dès les années 1960 dans le monde anglo-saxon et s’est cristallisé à partir des années 1990. Il commence maintenant à se développer un peu de ce côté-ci de l’Atlantique et dans l’Europe francophone. Il comporte aussi un aspect pratique et thérapeutique, avec des outils pour se relier et se réconcilier en profondeur avec la nature. Et l’écospiritualité? C’est aussi la quête de cette unité fondamen­ tale, mais cette fois avec une dimension spirituelle que l’on rend explicite. On a le cosmos, l’être hu­ main et une dimension de mystère qui va prendre selon les traditions religieuses, des formes et des expressions différentes. On peut appeler cela le divin, le sacré, l’Esprit, le Souffle. Dans une démarche chrétienne on parlera de l’Esprit saint, de Dieu, du Christ. On va fonder cette quête d’uni­ té et nos engagements écologiques en lien avec cette dimension du sacré, qui est transcendante, mais aussi immanente, c’est-à-dire au plus profond de la nature et de nous-mêmes. D’un point de vue chrétien, je trouve la notion de Création très riche, car elle présuppose un Dieu créateur et des rela­ tions entre tous les êtres créés dont elle est com­ posée, qui peuvent être des humains ou non. Cette vision présente donc aussi une forme d’unité entre l’être humain et les animaux, les plantes, les arbres, etc. Quelle est la différence entre les deux? On trouve en écopsychologie des psychothéra­ peutes, des écologistes, des philosophes, des ar­ tistes. Mais au départ, ce sont des psychothéra­ peutes qui ont commencé dans leur cabinet à ouvrir le protocole de dialogue pour comprendre les maux de leurs patients. Ils se sont aperçus que ceux-ci souffraient des problèmes écologiques et pas seulement des liens interhumains. L’écopsy­ chologie permet de reconnaître que faire du mal à la Terre, c’est se faire du mal à soi-même et in­ versement. L’écospiritualité tente de voir en quoi la vie spirituelle à avoir avec l’engagement écolo­ gique et quelle réponse la spiritualité peut appor­ ter à la crise écologique ou climatique, en com­ plément de de l’écopsychologie ainsi que, bien sûr, des mesures politiques et des changements de mode de vie. En quoi ces approches nous permettent d’appréhender le monde? Les changements climatiques, la sixième ex­ tinction des espèces, l’épuisement des ressources naturelles et les inégalités croissantes montrent que l’on ne vit pas seulement une «crise», mais un bouleversement systémique. Il ne s’agit plus d’apporter des correctifs au système économique «UNE ÉCOSPIRITUA- LITÉ EST NÉCESSAIRE» INTERVIEW DE MICHEL MAXIME EGGER «WIR BRAUCHEN EINE ÖKOSPIRITUALITÄT » INTERVIEW MIT MICHEL MAXIME EGGER

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