ENSEMBLE Nr. / N° 47 - April / Avril 2020

27 ENSEMBLE 2020/47 —– Fokus vivre puissent aussi reposer sur les grandes valeurs chrétiennes, telle que la justice. Refuser aux per­ sonnes queer une vie épanouie est synonyme d’in­ justice. Faisant référence à l’exposé introductif, une pasteure s’est exprimée en ces termes: «Nous jouissons d’une grande liberté et d’une autorité suffisante pour accompagner l’épanouissement de la vie, le ‹human flourishing›.» Réformé et queer Mathias Wirth a remercié les pasteures et les pas­ teurs pour leur esprit constructif, en particulier eu égard à la thèse selon laquelle les notions de «queer» et de «réformé» peuvent être pensées conjointement. Avec cette thèse, il réunit ce qui est rarement associé au niveau de la réflexion: la «famille réformée» et la «famille queer» et, à par­ tir de là, il justifie théologiquement son «approche inclusive» du mariage. Le professeur considère que les deux notions renvoient à une critique de l’iden­ tité. Il fut un temps où les couples réformés étaient tout aussi hors norme, en rupture par rapport à la tradition, que les couples homosexuels ou queers qui revendiquent l’égalité des droits au sein de l’Eglise et de la société. Selon lui, le terme «queer» désigne des pratiques sociétales et physiques dans le contexte de la sexualité et du rapport au corps qui s’écartent d’une norme identifiée déjà établie. Cependant, les normes et les identifications évo­ luent au cours des siècles de manière dynamique. Il suffit de considérer la tradition théologique ré­ formée ou de prendre l’exemple du concept de mariage ou de la compréhension du genre. La théologie réformée n’est pas figée, elle a même l’ambition de se renouveler et de changer constam­ ment. Selon le théologien, il ne s’agit donc pas de nier en bloc l’ordre établi, mais de le «considérer comme évolutif et de le transformer lorsqu’il de­ vient nuisible». Mathias Wirth apporte des justifications d’ordre éthique à sa critique d’une définition étroite des concepts identitaires, car, dit-il, per­ sonne n’a jamais une vision globale de la sexuali­ té et du corps, ni les théologiens ni quiconque. Cette critique des champs de l’identité qui sont des espaces particulièrement propices à la souf­ france, est très intéressante. Est notamment visé le privilège accordé au mariage entre hommes et femmes qui bannit les personnes ayant un corps différent, des pratiques corporelles différentes, ou des sensations physiques éloignées de la norme sociale culturellement établie. Il faut donc viser l’établissement de normes et de conventions qui, pour reprendre les mots de la théoricienne queer Judith Butler, permettent à tous de respirer, de désirer, d’aimer et de vivre. Selon Mathias Wirth, la théorie queer et certains pans de la théologie réformée portent un même intérêt éthique à l’épa­ nouissement des personnes en marge. A partir du moment où les pratiques et les convictions ne contribuent plus à une vie accomplie, alors, selon le professeur, «la théologie réformée n’a plus qu’une seule option: se réformer». Entrée en vigueur de la bénédiction de l’alliance pour tous La bénédiction de l’alliance pour tous ne peut être introduite tant que le Règlement ecclésias­ tique n’aura pas été revu. La manière dont le mariage pour tous peut se concrétiser en Eglise doit être discutée dans les paroisses, les arron­ dissements et la Société pastorale. Le Conseil synodal des Eglises réformées Berne-Jura-­ Soleure s’est déjà donné quelques rendez-vous: • Synode de réflexion Mariage pour tous: 20 mars 2021 • Révision partielle du Règlement ecclésias­ tique, 1 re lecture: Synode d’hiver 2021 • Révision partielle du Règlement ecclésias­ tique, 2 e lecture: Synode d’été 2022 La bénédiction de l’alliance pour tous devien­ dra une possibilité concrète au plus tôt mi-2022, à condition bien sûr que le mariage civil pour tous soit reconnu par l’Etat. Une initiative par­ lementaire qui ne nécessite qu’une modifica­ tion législative et aucun amendement consti­ tutionnel est pendante au Conseil national. Le référendum est annoncé. La famille, un endroit où les gens se prennent en charge les uns les autres et obtiennent du soutien. Die Familie als Ort, wo Menschen füreinander Verantwortung übernehmen und Rückhalt erfahren. ©Keystone /Westend61 /Mareen Fischinger