12 Doss i er —– ENSEMBLE 2022 /66 Pasteure à la cathédrale de Lausanne, Line Dépraz ose des cultes sortant de l’ordinaire. Avec succès, puisque le public est au rendezvous. La ministre nous livre sa vision de la cérémonie. Quelle est selon vous l’importance du culte? Le culte est primordial. Il reste le poumon de notre vie ecclésiale, mais aussi de la vie communautaire. Dans une société individualiste comme la nôtre, le rassemblement communautaire garde toute sa pertinence. C’est un moment de rencontre avec la parole qui vient nous décentrer. La confrontation au récit biblique est passionnante. Je pense qu’un texte n’a jamais fini de livrer sa signification. Le culte est un des axes importants de mon ministère. Dès mon entrée en fonction en 2019, je me suis interrogée sur la forme traditionnelle du culte et les «alternatives» à celui-ci en invitant plusieurs fois des laïcs. Le culte doit-il être renouvelé? Dans l’Eglise, nous avons de la peine à nous adresser aux gens. Nous restons bloqués dans un langage d’initiés, pétri d’allusions bibliques réservées à des connaisseurs. A la cathédrale, nous accueillons plutôt un public de passage. C’est pourquoi, nous avons entamé un travail de réécriture liturgique. Nous avons édité des liturgies et nous donnons aux gens un livret complet qui permet de lire et de s’approprier les textes. Nous tentons d’employer des mots de tous les jours afin qu’ils soient accessibles au plus grand nombre. Nous avons aussi travaillé sur le langage, en forme inclusive, de telle sorte que lorsqu’un pasteur prêche, il utilise le masculin et lorsque c’est une pasteure, elle a recours à la forme féminine. Pareil pour les participants. Nous employons par ailleurs beaucoup de textes dialogués: en tant qu’officiante je dis une partie du texte et l’assemblée y répond par une autre partie. Cela permet une participation plus active afin que le culte et la liturgie soient l’affaire de tout le peuple de Dieu et pas seulement l’affaire des ministres. Et cela fonctionne bien. Les gens sont reconnaissants. Vous organisez aussi des cultes spéciaux? A l’occasion des Jeux olympiques de la jeunesse en 2020, nous avons invité deux politiciens prêcher, l’un cantonal, l’autre municipal, l’un catholique, l’autre protestant, l’un de droite, l’autre de gauche. A Noël de la même année, nous avons organisé un «silent cult» qui permettait de respecter les restrictions sanitaires avec de courtes visites du public. A Noël dernier, j’ai organisé une prédication dialoguée avec le philosophe Alexandre Jollien. Cette année, pour le temps de la passion, nous avons invité des pasteures à prêcher sur les rencontres entre Jésus et des femmes dans l’Evangile de Jean. Cela s’est fait suite à une création musicale du chanteur Stéphane Blok et du musicien Théo Schmitt qui ont revisité la passion. A cette occasion nous avons aussi installé un jardin d’une cinquantaine d’oliviers dans le chœur de la cathédrale. Plusieurs artistes sont intervenus. Ce type de culte est-il la solution pour remplir les églises? On ne peut pas organiser des cultes spéciaux tous les dimanches, mais c’est possible à quelques grandes occasions. Nous devons aussi apprendre à diversifier les formes de culte. Ce dernier fait sens tant qu’il y a des gens rassemblés autour de lui. Si nous n’arrivons pas à réunir les gens, c’est qu’il y a un problème plus large dans notre Eglise. Je reste persuadée que les Eglises ont beaucoup de choses pertinentes à dire dans la société d’aujourd’hui. Encore faut-il oser et trouver la bonne manière de communiquer. L I N E D É P R A Z Diversifier les formes de culte
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