ENSEMBLE Nr. / N° 67 - September / Septembre 2022

21 ENSEMBLE 2022 /67 —– Doss i er vision est désormais concrétisée d’une manière inattendue par de jeunes familles qui, dans des circonstances difficiles, symbolisent la volonté de vivre et l’espoir en l’avenir», déclare Beat Abegglen. Si les personnes ukrainiennes ne sont pas toutes restées au village, il veut donner un signal clair à la trentaine d’entre elles qui continuent d’y habiter: «Vous êtes les bienvenues chez nous!» Le pasteur les considère en outre comme une chance pour la paroisse: «En tant qu’Eglise, nous pouvons désormais assumer très concrètement notre mission diaconale.» Olga Kuzyo a trouvé un nouveau foyer à une trentaine de kilomètres d’Innertkirchen. Une semaine après le début de la guerre, cette ophtalmologue ukrainienne de trente ans a quitté son pays avec sa fille, qui a dû ainsi fêter son quatrième anniversaire sans son père. C’est uniquement pour elle qu’elle est ici, explique Olga Kuzyo en berçant tendrement sa fille sur ses genoux. «Aujourd’hui encore, elle est paralysée par la peur lorsqu’un avion passe au-dessus de nos têtes.» Reconnaissante Olga Kuzyo vit aujourd’hui dans l’ancien foyer de l’Armée du Salut à Ringgenberg, où logent près de cent Ukrainiennes et Ukrainiens. Elle partage sa chambre avec sa fille, la salle de bains et la cuisine avec ses compatriotes. Malgré ces conditions modestes, elle est extrêmement reconnaissante: «La Suisse nous a très bien accueillies. Et c’est si bon d’être en sécurité.» Pour elle, «sécurité» ne signifie pas seulement l’absence de missiles et de bombes, mais surtout le sentiment d’être écoutée et bien accompagnée dans cette situation difficile. Ce sentiment, elle le doit notamment aux deux pasteurs de Ringgenberg, Nicole Staudenmann et Matthias Inniger. Lorsque l’ancienne maison de l’Armée du Salut s’est remplie à fin mars, Nicole Staudenmann a rapidement été sur place. Elle a demandé aux personnes ce qu’elles souhaitaient. «Il est vite devenu clair que nous voulions planifier et fêter ensemble la Pâque orthodoxe.» En quelques jours, une équipe de la paroisse aidée d’une traductrice et de réfugiées et réfugiés ukrainiens a mis en route l’organisation d’une célébration. «Cette fête était extrêmement importante pour nous. Il s’agissait du premier événement positif depuis longtemps», souligne Olga Kuzyo. «Nous avons été touchés que la paroisse locale organise la cérémonie dans le respect de la tradition orthodoxe.» Depuis lors, un culte conçu en commun par des Ukrainiennes et l’équipe pastorale a lieu tous les deux mois. Olga Kuzyo attache beaucoup d’importance à la prière commune, et elle apprécie que les portes de la cure soient toujours ouvertes pour elle et ses compatriotes. «Je sais ainsi que quoi qu’il arrive, je ne suis pas seule.» Le pasteur Matthias Inniger tient particulièrement au contact partenarial avec ces nouveaux habitantes et habitants du village. «Je découvre les Ukrainiennes et Ukrainiens comme des personnes très au clair et bien organisées. Elles demandent un partenariat et ne veulent pas être trop encadrées.» Le plus important à ses yeux est de regarder ensemble ce dont elles ont besoin et ce qu’elles apportent elles-mêmes. Avec près de cent personnes et autant de destins et besoins individuels, les demandes s’accumulent très vite. Pour l’équipe pastorale, il est évident que l’Eglise ne peut pas mettre en place toute une structure sociale. Mais elle peut ouvrir ses offres à toutes et à tous. «Ce que nous proposons concerne surtout le niveau spirituel et rituel. Et nous essayons d’ouvrir le toit de notre Eglise de manière à ce que tout le monde trouve une place et que nous puissions créer le plus de liens possibles en tant qu’Eglise», explique Matthias Inniger. Une tradition Outre Innertkirchen et Ringgenberg, d’autres paroisses de l’Oberland ont ouvert leurs portes aux personnes réfugiées d’Ukraine, mais en d’autres endroits, l’engagement local fait encore largement défaut. Matthias Inniger est conscient que le contexte à Ringgenberg était favorable: l’accompagnement de personnes réfugiées relève ici d’une longue tradition, et la commune politique est active et ouverte. Cependant, même si la situation n’est pas toujours aussi bonne, Matthias Inniger est convaincu que: «Simplement aller vers les gens et prendre contact avec eux, c’est possible partout.» * Collaboratrice service Migration La culture du partage. Kultur des Teilens. © Selina Leu

RkJQdWJsaXNoZXIy Mjc3MzQ=