ENSEMBLE Nr. / N° 67 - September / Septembre 2022

30 Fokus —– ENSEMBLE 2022 /67 Actuellement, que se passe-t-il en Suisse avec des victimes de traite qui ont été recrutées et exploitées à l’étranger? En cas de soupçon de traite d’êtres humains, le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) mène certes une audition approfondie sur la situation. Pour les personnes concernées, cet interrogatoire est toutefois dans de nombreux cas un poids supplémentaire, car elles doivent, en étant sous pression, raconter à nouveau leur vécu. Le SEM prend ensuite une décision d’asile comme pour tous les requérants. C’est problématique, notamment pour les personnes qui sont considérées comme des «cas Dublin». Comme un autre Etat est responsable pour leur demande d’asile, elles reçoivent généralement rapidement une décision de renvoi dans l’Etat Dublin de provenance. Et ensuite? Une fois expulsées, sans ressources et sans adresses de services d’aide, il est probable que ces personnes tombent de nouveau rapidement dans les griffes de trafiquants d’êtres humains ou dans une situation d’exploitation. Imaginez, une femme traumatisée est expulsée vers Milan. Là, elle est coincée à la gare, le soir, sans argent, elle ne connaît pas la langue, elle ne connaît personne. Vulnérable et dépendante d’une aide, le risque est grand qu’elle soit à nouveau victime de l’exploitation et de la violence. La Suisse ne devrait-elle pas mieux protéger ces gens? Si, évidemment. A la suite de plusieurs décisions de justice, le SEM doit demander dans certains cas des «garanties» à l’Etat de provenance. T R A I T E D ’ Ê T R E S H U M A I N S Pas d’issue sans l’Etat Les requérants d’asile victimes de traite à l’étranger ne reçoivent que peu de protection en Suisse. Un projet financé par l’Eglise veut changer la donne. Par Selina Leu* Géraldine Merz, vous êtes responsable du projet «Protection complète pour les victimes de traite d’êtres humains dans le domaine de l’asile», issu du service spécialisé pour la traite des femmes et les migrantes (FIZ). Pourquoi un projet qui soutient explicitement les personnes ayant vécu l’exil? De nombreuses personnes sont victimes de la traite d’êtres humains durant leur exil. Si elles tombent entre les mains de trafiquants en Suisse, elles ont accès à des mesures de soutien grâce à la loi sur l’aide aux victimes. Si le crime a eu lieu à l’étranger, elles n’ont aucun accès à une aide étatique. Quelles offres de soutien seraient utiles aux personnes concernées et requérantes d’asiles? Les mêmes que pour toutes les victimes de traite d’êtres humains: l’accès à un logement spécialisé, à des conseils, à un service de traduction et à une aide d’urgence matérielle et médicale. Tout ce que prévoit la Convention européenne sur la lutte contre la traite des êtres humains. D’autres Etats européens le garantissent, indépendamment du lieu du crime. F «La traite des êtres humains est un sujet extrêmement sensible.» «Menschenhandel ist ein extrem heikles Thema.» © Sabine Rock

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