31 ENSEMBLE 2022 /67 —– Fokus Mais celles-ci se limitent en général à une question: existe-t-il un accès au système d’asile ou à un logement, et est-il théoriquement possible de consulter un service spécialisé d’aide aux victimes ou la police sur place? Mais cette femme arrive toujours seule à la gare de Milan et on attend d’elle qu’elle se débrouille toute seule. Comment le projet du FIZ peut-il soutenir les personnes concernées? Grâce au soutien financier des Eglises, nous pouvons conseiller les personnes victimes de traite d’êtres humains à l’étranger chez nous, de manière «ambulatoire». Concrètement, nous leur offrons des conseils sur le plan psycho-social et leur expliquons leurs droits. La traite d’êtres humains étant complexe et son identification un processus, nous essayons de déterminer ce qu’il s’est exactement passé et préparons ensuite une évaluation à disposition de la représentation juridique qui intervient dans le dossier d’asile. Cela influe aussi en partie sur une éventuelle décision de procédure Dublin. Cependant, en raison de son urgence, la procédure d’asile accélérée est problématique pour les personnes victimes de la traite d’êtres humains, car cela prend du temps de construire la confiance et de clarifier la situation. Lorsqu’une personne est tout de même renvoyée, nous essayons au moins de découvrir quand et où la personne sera expulsée. Afin qu’une organisation partenaire puisse ensuite accueillir la personne à la gare et organiser un soutien. Pourquoi compte-t-on autant de migrants parmi les victimes de la traite d’êtres humains? Cela a beaucoup à voir avec notre politique d’exclusion en Europe: s’il y avait des voies de fuite légales et sûres et des possibilités de migrer, la traite d’êtres humains serait certainement moins lucrative le long des routes de la migration. Car dans de nombreux cas, les «frais de voyage» sont avancés, frais qu’une personne doit ensuite rembourser à des conditions complètement défavorables. Plus la route est difficile, plus la chance est donc grande de tomber sur des personnes mal intentionnées? Oui. Prenons l’exemple des Ukrainiennes. Il y a certainement aussi parmi elles des victimes de traite d’êtres humains, mais le FIZ n’a eu jusqu’ici connaissance que de peu de cas. Les réfugiés ukrainiens peuvent se déplacer librement en Europe. Un aspect important qui favorise la traite est ainsi écarté. Mais naturellement il faut être attentif car l’exploitation n’est pas uniquement possible le long des voies d’exil, mais aussi après l’arrivée, en raison d’une situation particulièrement vulnérable. Quelles sont donc les traits distinctifs de la traite? La traite d’êtres humains est centrée sur un objectif et sur le profit. Des gens se retrouvent souvent coincés quelque part à cause de fausses promesses, puis exploités contre leur volonté, sous la contrainte ou menacés. Ils ne peuvent plus décider par euxmêmes. De plus, la traite n’a pas lieu que dans la prostitution, mais aussi dans d’autres domaines comme l’économie domestique ou l’agriculture. Pourquoi est-il si difficile pour les personnes concernées de se libérer? Différents facteurs entrent en jeu. En plus de l’endettement, le fait que ces personnes ont souvent un statut illégal en Suisse joue un rôle important. De plus, on les menace souvent de s’en prendre à leur famille, au cas où elles s’échapperaient. Que peut faire l’Eglise? D’une part, nous sommes très reconnaissants de l’aide financière. Notre but avec ce projet, en plus du soutien juridique aux personnes, c’est que la Suisse respecte enfin la Convention européenne sur la lutte contre la traite d’êtres humains et offre une protection complète à toutes les victimes. Nous sommes aussi heureux lorsque les Eglises nous mettent en contact avec ces personnes. Nous collaborons très bien avec les aumôniers. Ces derniers offrent un cadre très important aux personnes concernées: elles peuvent s’ouvrir et se confier à eux. Que peuvent faire monsieur et madame Tout-lemonde face à une personne que l’on sent victime de traite? Surtout ne pas l’interroger! Cela peut être à nouveau traumatisant pour les personnes concernées. Et la disposition à se confier plus tard auprès d’un spécialiste diminuera. La traite d’êtres humains est un thème très délicat, qui est lié à de nombreuses blessures et qu’il faut traiter de manière sensible. Lorsque des bénévoles sont sensibilisés et vigilants, ils reconnaissent de potentielles victimes. En cas de soupçons, ils peuvent s’adresser à nous. * Collaboratrice service Migration Le projet «Protection complète pour les victimes de traite d’êtres humains dans le domaine de l’asile» est financé par les Eglises nationales réformée et catholique du canton de Zurich et par l’union catholique de la ville de Zurich. Refbejuso soutient également le service spécialisé pour la traite des femmes et les migrantes depuis des années. Géraldine Merz était conférencière lors de la rencontre annuelle du réseau Joint Future du service Migration.
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