ENSEMBLE Nr. / N° 69 - April / Avril 2023

10 Dossier —– ENSEMBLE 2023/69 En Suisse romande, les Centres sociaux protestants (CSP) sont devenus incontournables dans le secteur de l’aide aux plus fragiles. Dans le Jura bernois et en ville de Bienne, l’institution apporte un soutien structurel aux personnes touchées par la précarité. Interview de son directeur Pierre Ammann. Par Nathalie Ogi Quelle est la situation sur le front de la précarité en Suisse? Les CSP constatent depuis quelques années une paupérisation croissante des personnes issues de la classe moyenne qui s’est divisée en deux catégories: la classe moyenne inférieure et la classe moyenne supérieure. On observe de plus en plus que personne n’est à l’abri. A la faveur de divers imprévus qui peuvent se cumuler, comme une perte d’emploi, un burn-out ou une séparation, des gens qui n’apparaissaient pas comme des prototypes de personnes pauvres connaissent des difficultés économiques qu’ils n’avaient jamais rencontrées auparavant et auxquelles ils n’étaient pas préparés psychiquement. Ils doivent soudainement admettre qu’ils font partie de cette catégorie de la population. La précarité a donc un peu changé de visage au 21e siècle. On estime aujourd’hui qu’environ 20 % des ménages ne sont pas en mesure de faire face à une dépense imprévue de plus de 2500 francs, qu’il s’agisse de frais dentaires ou d’une réparation automobile par exemple. Quelle aide apporte le CSP? Le CSP ne fait pas de distribution alimentaire comme d’autres œuvres d’entraide en Suisse. Dans certaines situations urgentes, nous distribuons parfois des bons Migros. Notre rôle est plutôt structurant. Lorsque des gens font appel à nous, notre secteur social et dettes s’attache à analyser leur situation financière, à examiner le budget de leur ménage, etc. Il s’agit d’examiner si le déficit est structurel et de quelle ampleur, d’analyser la nature et le niveau des dettes. Dans ce cadre, il nous arrive de solliciter une fondation privée et des fonds extérieurs pour un coup de pouce financier exceptionnel qui servira peut-être à payer des retards de primes d’assurance maladie ou des factures d’électricité. Pendant la pandémie, nous avons aussi pu solliciter la Chaîne du Bonheur pour aider ceux qui passaient entre les mailles du filet. Mais ces fonds sont aujourd’hui épuisés ou arrivés à échéance. Notre rôle est plutôt de soutenir les gens afin qu’ils puissent trouver eux-mêmes des solutions à leurs difficultés par un déménagement, en renonçant à la voiture ou à d’autres dépenses non essentielles. Nous nous contentons de donner des pistes, sans rien imposer. INTERVIEW «La pauvreté a changé de visage» Pierre Ammann, directeur du CSP Berne-Jura © Nathalie Ogi

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