9 ENSEMBLE 2023/71 —– Dossier concerne la Suisse, la grève des femmes en 2019, sont des pas en avant. Ils ont permis d’accroître la visibilité. Mais, comme le souligne Sara Speicher, «ceci ne signifie pas nécessairement qu’il soit plus facile d’en parler ou que les actes de violence aient diminué. En fait, le confinement et les répercussions économiques pendant la pandémie du Covid ont augmenté les cas de violence domestique. Il nous faudra encore beaucoup travailler.» Le financement des places de protection et de soutien aux victimes est faible, autant sur le plan international que national. On déplore aussi un manque important de données. «Il y a très peu de chiffres en Suisse et dans le monde. C’est un problème massivement sous-estimé qui demeure fortement tabou. On consacre trop peu d’argent à la recherche», affirme Barbara Heer. En outre, au niveau politique et juridique il reste des efforts à faire. En Suisse, par exemple, malgré la révision du droit pénal en matière sexuelle et la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, il subsiste une ambivalence et une certaine résistance que l’on retrouve dans le système judiciaire. «Dans les tribunaux, il y a des préjugés à l’égard des victimes. Souvent, on ne croit pas les femmes. La retraumatisation est un thème important lors des interrogatoires. Le procès pénal est une lourde charge pour les survivants et conduit rarement à une condamnation», dit-elle. Les Eglises, acteurs de changement La tragédie de la violence de genre reste une plaie à vif. «Cela signifie seulement que nous ne pouvons pas cesser nos efforts», argumente Sara Speicher. «Au COE, nous parviennent des nombreuses histoires de personnes du monde entier inspirées par la campagne des Jeudis en noir, motivées à agir, à promouvoir l’engagement de vaincre la violence de genre.» Cette prise de conscience a amené à l’introduction de politiques et pratiques contre les abus et le harcèlement sexuel au sein des Eglises. «Les Eglises sont aussi des employeurs, des lieux publics où ce type de violence se produit. Nos Eglises partenaires doivent avoir des règlements contre le harcèlement sexuel. Nous organisons des cours et des échanges à cet effet», dit Barbara Heer. Autre enjeu majeur: impliquer les hommes et examiner les conceptions de la masculinité. «Les hommes jouent un rôle clé dans la diminution de la violence de genre. Il est important de leur montrer que leur liberté est aussi limitée par le patriarcat», poursuit-elle. «Le travail pour la paix est trop souvent compris comme l’absence de guerre, et la violence quotidienne, la violence de genre, est oubliée. Les Eglises, en tant qu’acteurs de changement, doivent apporter leur message de paix dans ce domaine», conclut-elle. Pour en savoir plus, consultez les pages web suivantes: − Campagne «Jeudis en noir» du Conseil œcuménique des Eglises − Campagne «16 journées de mobilisation contre la violence sexiste» coordonnée par le cfd, l’ONG féministe pour la paix − Projets de Mission 21 dans le champ d’action «Egalité des genres» © Marcelo Schneider/ÖRK «Pour un monde sans viol et sans violence». «Für eine Welt ohne Vergewaltigung und Gewalt».
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