11
ENSEMBLE 2015/2 —– Dossier
La musique et les louanges occupent une
grande place dans les Eglises africaines
issues de la migration. Une manière
de vivre sa foi corps et âme qui peut être
quelque peu déstabilisante pour les
Réformés que nous sommes.
de Nicolas Meyer
Difficile de ne pas être pris par le rythme d’une
célébration africaine lorsqu’on y participe. C’est
en tout cas la constatation faite par Liliane-La-
nève, du Forum des questions actuelles de la pa-
roisse de Bienne, qui travaille en lien avec plu-
sieurs communautés du continent africain dans
le cadre du projet «Etre Eglise ensemble». «Au
début, on se sent un peu gênés, mais on entre très
vite dans la démarche», souligne-t-elle. Dans la
plupart des cultes qu’elle a fréquentés, le fait de
chanter tout en se tenant par les mains et en se
déplaçant dans l’espace permet de vivre sa foi à
travers tout le corps. Même si elle note tout de
même certaines différences culturelles, elle ap-
précie cette manière de célébrer Dieu: «Nous ne
sommes pas très habitués à cela sous nos latitudes,
mais c’est très libérateur.»
Question d’interprétation
Pour Henriette Té Schiavinato, responsable du
Centre Mamré de Bienne, la musique permet d’ai-
der à entrer dans la présence de Dieu. Pour cette
pasteure, originaire de Côte d’Ivoire, la musique
et les chants occupent plus de place dans les cé-
lébrations africaines que dans les cultes euro-
péens. Ceci découle notamment du fait que leurs
durées est nettement plus longue: «Nos cultes
durent plus de deux heures, avec une grande place
faite aux louanges.» Selon elle, même si la plupart
des chants sont similaires à ceux des Eglises réfor-
mées occidentales, ils jouent dans ces communau-
tés un rôle fondamental dans l’expression d’une
foi vivante qui permet la rencontre, apporte tonus
et joie et redonne du courage.
Un lien universel
Une fonction qui prend toute son importance,
lorsque l’on réalise que la provenance des per-
sonnes migrantes venues d’Afrique est extrême-
ment diverse. «En ville de Bienne, nous avons des
ressortissants dont la langue maternelle est soit
le français, soit l’anglais», souligne Henriette Té
Schiavinato. De plus, chaque communauté est ou-
verte à plusieurs nationalités et ethnies: «Au
Centre Mamré, nous avons des Camerounais, des
Togolais, des Ivoiriens, et même des Européens.»
La langue maternelle sert ainsi de base à l’inté-
gration dans une communauté. Des chants en
dialectes sont également parfois entonnés dans
les assemblées, suivant l’origine des participants.
Un acte de communion
Pour le pasteur biennois Luc N. Ramoni, égale-
ment impliqué dans le projet «Etre Eglise en-
semble», le fait de se relier aux autres avec la
même musique permet de créer un lien très fort
au sein de l’assemblée: «Même si l’on a parfois de
la difficulté à entrer dans le texte, cela permet une
communion qui dépasse le simple intellect.» Pour
lui également, la culture de chant africaine est
nettement plus marquée que la culture de chant
européenne: «Aujourd’hui, on remarque que les
chants sont de moins en moins connus dans les
cultes, ce qui amène à une certaine dissolution de
l’assemblée.» Une situation qui découle, selon lui,
CÉLÉBRER AUX
RYTHMES
DE L’AFRIQUE
ÉGLISES DE LA MIGRATION
ZU
AFRIKANISCHEN RHYTHMEN
FEIERN
MIGRATIONSKIRCHEN