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ENSEMBLE 2017/15 —– Dossier
l’industrie manufacturière et dans le domaine
commercial. Dans ces deux domaines, de nom-
breuses places de travail ont été perdues ces dix
dernières années.
Est-ce que la quantité de suppression d’emploi
s’égalise quand on considère le marché du travail
dans son ensemble? Est-ce qu’il y a plus de places
qui ont disparues dans certains domaines, et pour
cela moins dans d’autres?
Quand on regarde les derniers grands boule-
versements technologiques, on remarque en fait
tout de même une croissance du nombre d’emplois
à un niveau global. Ces 20 dernières années en
Suisse, 800 000 nouvelles places de travail ont été
créées, et cela malgré une automatisation accélé-
rée. L’augmentation de la productivité conduit
aussi à une demande accrue qui génère de nou-
velles places de travail.
Comment le taux de chômage a-t-il évolué ces dix
dernières années?
Quand on observe le marché du travail dans
son ensemble, on observe plusieurs paramètres
importants. D’un côté le taux de chômage, de
l’autre aussi la participation au marché du travail,
c’est-à-dire le pourcentage de la population en âge
de travailler qui travaille effectivement. Parmi les
gens aptes à travailler, on enregistre une tendance
générale vers le haut, en particulier chez les
femmes. En Suisse, le pourcentage de gens aptes
à travailler et qui travaillent réellement est au-
jourd’hui de 84 pour cent. C’est un chiffre extrê-
mement haut par rapport au reste du monde. En
ce qui concerne le chômage, on est actuellement
à 3,3 pour cent, ce qui est un bon chiffre, même si
celui-ci a monté depuis 2015, après que la banque
nationale ait aboli le taux plancher du franc par
rapport à l’euro.
Et pourquoi cet événement a-t-il fait augmenter le
taux de chômage?
Comme le franc a alors pris de la valeur (surtout
par rapport à l’euro), les produits manufacturés en
Suisse sont devenus plus chers à l’extérieur – sur-
tout dans la zone Euro. Dans ces conditions, l’ex-
portation suisse a particulièrement souffert. Ce
phénomène a touché avant tout l’industrie des
machines, l’industrie du métal, le tourisme et en
partie le commerce de détail. L’année dernière,
dans le secteur de l’industrie, nous avons enregis-
tré une perte de 7000 places de travail.
Vous avez évoqué à plusieurs reprises la flexibilité,
mais quelles formes de travail flexibles existe-t-il?
La flexibilisation est à considérer à trois ni-
veaux: au niveau du lieu, du temps, et de l’entre-
prise. La flexibilisation au niveau du lieu signifie
que l’on peut exécuter son travail depuis la maison,
depuis son propre domicile. Par flexibilité du
temps, on entend généralement que le temps peut
aujourd’hui être divisé et organisé de manière plus
libre. Alors que par flexibilisation au niveau de
l’entreprise, on entend généralement la délocali-
sation de plusieurs étapes de travail, ou le travail
à temps partiel. Ces dix dernières années, et dans
le contexte de la digitalisation, de nouveaux mo-
dèles de travail se sont ainsi développés. Par
exemple la plateforme «Uber» qui sert d’intermé-
diaire de transport ou le «Mechanical Turk» de
Amazon.
C’est ainsi quasiment tout un chaînon intermé-
diaire qui disparaît. Qu’est-ce que cela signifie pour
le marché du travail?
Ce que cela signifie pour le marché du travail,
la société et les lois, est actuellement discuté, de
manière très controversée, à un niveau national et
international. Une question est par exemple de
savoir si «Uber» est un réel employeur ou juste un
intermédiaire. Quelles relations juridiques et
quelles obligations naissent alors par rapport à la
sécurité sociale, à la protection de la santé et à la
formation?
Si cela se développe, il pourrait tout à fait appa
raître de nouvelles formes de concurrences.
Oui, cela peut créer de nouvelles situations de
concurrence. Globalement nous sommes – comme
dans tout changement structurel en général –
confrontés ici à des chances et à des risques. De
telles formes de travail peuvent ainsi également
être une chance pour les personnes qui dépendent
de tels engagements flexibles, ou alors qui n’ont
pas trouvé de place sur le marché du travail tradi-
tionnel. Il est trop tôt pour faire un bilan général,
d’autant qu’il nous manque encore une partie des
statistiques dont nous aurions besoin pour faire
cela. Le conseil fédéral va bientôt produire deux
rapports à ce sujet.
Ursina Jud Huwiler
©seco